• Comprendre le couac d'Edith Piaf au Play House...

    Comprendre le couac d'Edith Piaf au Play House...


    Intéressant le témoignage que livre Simone de BEAUVOIR dans Piaf, la vérité d'Emmanuel BONINI, paru en 2008 chez Pygmalion. Un témoignage qui complète à merveille ce qu'Hubert LANCELOT avait consigné dans sa biographie sur les COMPAGNONS publiée en 1989. "Edith éclipsée par ses Compagnons... Bien sûr que la presse souligne son talent, sa voix prenante, sa simplicité, mais on sent bien qu'elle n'adhère pas à son tour de chant, plus désorientée même que franchement critique. En grande professionnelle, Edith va rapidement analyser son demi-échec. Il tient en effet à un malentendu. Pour le public américain Edith c'est Paris, le Gay Paris au Lido ou au Moulin Rouge. Strass, paillettes, plumes et costumes somptueux. Et voilà que la star se présente dans sa robe de quatre sous, sans maquillage, sans bijoux... ça n'est pas l'image de la Parisienne telle qu'on se la représente en Amérique. Et voilà qu'elle nous chante de sombres drames de la vie et de l'amour. Alors là non, ç'en est trop ! Ce que veut le spectateur américain, c'est de la gaieté, des histoires de fleur bleue, des romances qui finissent bien. En entrant, il a laissé ses soucis au vestiaire, il vient chercher deux ou trois heures de bonheur, d'oubli, d'enchantement..."

    Comprendre le couac d'Edith Piaf au Play House...Simone de BEAUVOIR écrira dans une lettre à propos de ce tour de chant d'Edith : "Vous m'avez interrogée sur Edith PIAF. Précisément, je reçois une lettre d'amie française de New York qui vient d'assister à un de ses concerts ; eh bien, les chanteurs qui l'accompagnent (1), qui n'ont pas la moitié de son talent, ont remporté infiniment plus de succès qu'elle."

    La compagne de Jean-Paul SARTRE s'était renseignée sur ce paradoxe auprès de son amie. "D'après elle, les Américains, confrontés avec la réalité française, réagissent exactement comme nous en France par rapport aux réalités américaines : ils apprécient ce qui, à leurs yeux, a l'air français. Les chanteurs en question, qui interprètent de vieilles chansons françaises, ils les ont compris et aimés. Mais les vrais phénomènes français n'ont pas l'air à ce point français, ils ne sont que nouveaux. En France, nous les goûtons parce qu'ils sont différents des vieilleries françaises. Par analogie, je perçois très bien que ce qui m'a d'abord attirée en Amérique a été ce qui à mes yeux paraissait typiquement américain. A présent que j'en sais un peu plus, les faits importants chez vous ne me paraissent plus si ouvertement américains, vous voyez ce que je veux dire ? Edith PIAF dans sa robe noire, avec sa voix enrouée et son visage ingrat, n'a guère l'apparence française, les Américains ne savent que trouver en elle, et restent froids. A nous, ici, elle nous plaît, nous la jugeons extraordinaire et étrange, de cette étrangeté qui naît quand beauté et laideur se rencontrent. Or, vous m'avez dit vous-même que vos compatriotes goûtent peu ce genre de mélange. Et puis, quand elle touche son cou, le tour de son cou, en un geste bizarrement sensuel et angoissé, le public n'aime pas ça : c'est l'endroit où les hommes souffrent de la gueule de bois le lendemain, c'est la place où les femmes frustrées désirent sentir les lèvres d'un homme et ne les sentent pas, si bien que tout le monde est mal à l'aise."

    On précisera ici que celle de que l'on considérait déjà en octobre 1947 comme une vieillerie française, rencontrera enfin le succès quelques jours plus tard dans un cabaret de New York, le Versailles. A la suite d'un article réhabilitant écrit par un chroniqueur local. Comme quoi... 

     

    (1) les COMPAGNONS DE LA CHANSON

     

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